Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
19 juillet 2008 6 19 /07 /juillet /2008 17:18


 

Fred Benvenuto est né à Montélimar en 1962, il vit et travaille à Puygiron.

 « La modernité a trouvé là une de ses stratégies privilégiées : extraire des choses de leur contexte initial pour modifier à la fois le regard porté sur ces choses et les conceptions de l’art. Du reste cette façon de sortir les choses de leur environnement afin de les comparer à d’autres, issues d’environnements différents, est une des méthodes employées par la science, et par la pensée moderne en général, pour accroître le savoir et affiner les concepts.

                    Kirk Varnedoe[1]

Les premiers objets que j’ai vus de Fred Benvenuto étaient des sièges, des tables, insolites, massifs, du mobilier surprenant posé chez des amis, en fer rond, récupéré le plus souvent, me dira-t-il, plus tard. Aucun meuble ne ressemblant à l’autre. Cela ne pouvait que donner envie de rencontrer celui qui les fabriquait.

Il faut cheminer dans la campagne pour rejoindre la ferme Saint Bonnet, isolée au bout du chemin du bois des pins où s’est installé depuis quelques mois Fred Benvenuto. Il a choisi l’isolement, dans une nature relativement préservée, puisque sangliers et chevreuils viennent encore boire au pied du large saule dans le ruisseau derrière la belle maison de pierre.

D’entrée les objets accumulés sont autant de signes révélateurs d’une quête de toutes les traces concrètes de la créativité industrielle ou artisanale, pièces monumentales ou minuscules, moteur, phare, pied de lampe tourné, décor de verrerie qui attendent d’être réemployés. Il les regarde et il sait que ce qui a été considéré comme un rebut, va prendre nouvelle vie, sens, dans la dynamique de la création.

Il ne se dit pas écologiste. On y pense pourtant. Car il récupère et réemploie. On dira qu’il l’est de surcroît, mais sa démarche ne se limite pas à un souci de sauvegarde d’objets, ni de collection, ni de souci de l’environnement, même si sa philosophie de vie intègre ces valeurs.

Chaque artiste interroge le monde avec ses propres matériaux et ses formes. Fred Benvenuto choisit de prospecter le futur avec les éléments du passé, d’inventer une sorte de lexique du temps où la mémoire alimente la vision prospective.

Les sculptures qu’il fabrique en assemblant des éléments disparates au départ, tuyau, pied de baignoire, vieux fusil, en font oublier la destination première. L’agencement, le traitement des surfaces, définissent une forme finale qui, dans sa perfection, absorbe les lignes de tous les morceaux du puzzle, et l’on voit quelque chose de complètement nouveau, insolite, drôle, poétique, émouvant même.

Il n’a nulle volonté de surprendre mais il surprend par sa capacité à jouer avec les certitudes, à bousculer les pièces du jeu de l’art, à réinventer des règles, somme toute à les détruire, grâce à l’esprit d’enfance qui est en lui, à la liberté qu’il se donne.

L’objet a perdu sa finalité, il est devenu magique et peut se prêter à toutes les combinaisons. Qu’est-ce cette arlésienne, voiture-sculpture à la grâce toute féminine, ou encore cet avion furtif néolithique où l’on a du mal à reconnaître des crânes de sangliers et d’agneaux tant ils sont polis et patinés ?

Fred Benvenuto s’enchante et enchante, refaisant le monde à sa manière. Sans aucun doute ce n’est pas un donneur de leçon mais on ne peut s’empêcher de le suivre là où il nous mène, à reconsidérer ce qui est établi : la beauté, un certain ordre du monde, du temps. Et si tout cela émanait d’une grande exigence ?


             N.P.

Publié dans Le  Giron n° 1 (décembre 2001)


[1] « Au mépris des règles » par Kirk Varnedoe. Directeur du département des peintures et sculptures au Musée d’Art moderne de New-York, éd. Adam Biro.

Partager cet article
Repost0

commentaires

Le Giron

  • : legiron
  • : Ensemble d'informations, de textes et d'images publiés par un groupe d'habitants du village de Puygiron dans la Drôme.
  • Contact

L'association

                L'association "Le Giron" a été créée le 24 septembre 2001 et a mis fin à ses activités en juillet 2013. Elle avait pour objectif de favoriser la rencontre et le dialogue entre les habitants de la commune afin de réfléchir ensemble à l'évolution de leur cadre de vie.
       Au cours de ses douze ans d'existence elle a atteint ses objectifs, donnant la parole aux "anciens", pour sauvegarder la mémoire du passé et même temps ouvert un dialogue avec les idées porteuses d'un avenir ouvert sur l'humanisme, l'écologie, la protection de la Nature, et bien sûr "l'autre", celui qui existe au-delà des frontières de notre pays. Elle a publié vingt et un numéros du "Giron" distribués gratuitement sur le territoire de la commune de Puygiron et au-delà, créé une bibliothèque de prêt. "Le Giron a été déposé à la Bibliothèque nationale.
       Le blog du "Giron" continue et reste ouvert à la contribution de ses anciens animateurs pour que vive son esprit et sa philosophie.

Recherche

Le Giron, bulletin semestriel

Un bulletin pour quoi faire ? Pour se rassembler le temps d’une lecture, se dire qu’on fait partie d’un village et qu’on a des intérêts, des souvenirs, des projets communs. Pour donner envie aux gens de réfléchir à ce qui se passe autour d’eux, à parler à leur tour car seul le dialogue fait avancer le monde.

Le village perché de Puygiron

                                                               Aquarelle de Morice Viel

Belvédère de la Drôme provençale, situé sur un mamelon dominant le Jabron et la plaine de la Valdaine, offrant un très beau point de vue. Au hasard des ruelles, on admirera portes et fenêtres encadrées de pierres sculptées. Le premier village médiéval était situé à Saint-Bonnet, près du prieuré carolingien, sur le site d’une villa gallo-romaine. Ce premier village fut abandonné au XIIIe siècle et les habitants se réfugièrent sur « le puy » sous la protection du château.

Le château : construit fin XIIe / début XIIIe siècle, construction rectangulaire flanquée de quatre tours, l’une d’elles formant donjon. À proximité, la salle des gardes, avec une énorme cheminée et des voûtes retombant sur un énorme pilier central. Une cour intérieure avec une tour Renaissance hexagonale possédant une porte ogivale et escalier à vis. Le château a été classé monument historique en 1957.

L’église, de style roman, construite en 1867. La chapelle romane Saint-Bonnet : datée du XIIe siècle, église paroissiale jusqu’en 1770, elle présente une abside en demi-cercle voûtée en cul-de-four, un chœur surélevé, une nef unique de trois travées, un escalier à vis qui conduisait à un clocher aujourd’hui disparu. La pierre de Puygiron a été exploitée jusqu’en 1914.

Puygiron a eu son chantre, le félibre Morice Viel (1881 - 1929).

D'après Jeannine Laurent (Etudes drômoises, n° 3, année 2000, p. 41)

Pages