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29 octobre 2008 3 29 /10 /octobre /2008 11:41


       À l'époque, il n'y avait pas de sécurité sociale et, par conséquent, on attendait une situation vraiment critique pour faire déplacer le médecin. On se débrouillait seul en utilisant les soins appropriés à chaque mal. Il n'y avait que trois ou quatre médecins à Montélimar, et deux à Dieulefit : un protestant et un catholique soignant respectivement chaque communauté. Cependant, c'est bien le médecin protestant qui se déplaça pour soigner la jambe cassée du frère de Pierre, alors qu'il n'était pas de la même confession.

       Les grossesses se passaient sans contrôle prénatal. Quand l'heure de la naissance arrivait, on allait chercher la sage-femme et cela se passait, en général, à la maison. À Puygiron, c'est Joséphine Sauvan, épouse du chef de gare, qui assistait les futures mamans, aidée par une ou deux voisines. Sa formation venait sûrement d'une autre sage-femme... Les hommes n'étaient pas tolérés dans la chambre et on leur demandait d'aller chercher de l'eau chaude : ça les occupait ! On appelait le médecin dans un cas extrême et parfois, il était trop tard, comme pour Léona Piallat, décédée tragiquement d'une hémorragie lors de la naissance de son troisième enfant. Les nouvelles mamans restaient alitées une semaine à la suite de leurs couches pour éviter tout risque, et donnaient le sein à leur bébé, pudiquement, sous une serviette. On pouvait accoucher aussi à l'Hôtel-dieu de Montélimar, hôpital situé dans la grande Rue (actuel musée de la miniature), où les religieuses, pas toujours très douces, vous attendaient. Jeanne se souvient de l'accueil glacial qu'elle avait reçu pour la naissance de Colette. Mais, comment pouvez-vous accoucher dans votre état ?  lui avait-on dit, parce qu'elle avait malheureusement contracté la poliomyélite pendant sa grossesse.

       Finalement, Colette était bien née ! Monette se rappelle que son époux, Pierre, désireux d'être présent, avait été accepté dans la salle d'accouchement, même si à l'époque ça n'était pas courant...

       On vaccinait les enfants uniquement contre la variole, en laissant une belle empreinte sur le bras. Vers les années soixante, celle-ci s'est déplacée sur le pied des petites filles, par esthétisme. Les enfants attrapaient donc toutes les maladies dites de la petite enfance et souvent contagieuses: coqueluche, rougeole, oreillons... maladies infantiles que l'on ne voit plus. Avant l'apparition des vaccins correspondants, il arrivait aussi de contracter la tuberculose ou la poliomyélite.


       La tuberculose a fait des ravages dans les années 30, surtout dans les villes ouvrières. On allait se soigner dans des sanas, sanatoriums à la montagne. À Dieulefit, il y avait le Centre pulmonaire du docteur Préault où l'on soignait aussi les tuberculeux. Le docteur Préault était un médecin très apprécié et avant-gardiste dans son domaine. Jeanne se souvient tristement des enfants, au Centre, installés en déclive, sur une planche, attachés par les pieds, la tête inclinée vers le bas, les aidant à expectorer. Dans les écoles, les institutrices faisaient vendre par les enfants des carnets de timbres permettant de récolter quelques fonds pour lutter contre la tuberculose. Vers les années cinquante, l'amélioration des conditions de vie et l'apparition du vaccin BCG ont fait reculer cette maladie.

       Monette évoque que petite, elle n'avait jamais vu de docteur ! Pour les bronchites, on plaçait sur la peau des ventouses en verre, chauffées à l'aide d'une mèche alcoolisée. L'application des ventouses chaudes sur la peau, entraînant parfois des brûlures, faisait le vide entre la peau et la ventouse et tirait le mal. La peau devenait souvent violette sous les ventouses. Parfois, on sclérosait même la peau en faisant une petite croix à l'emplacement de la ventouse.

       On posait aussi des sinapismes sur la poitrine sous forme de cataplasmes de farine de lin et de graine de moutarde. Contre les maux de gorge, on appliquait sous un linge de la teinture d'iode sur la peau, tout autour du cou. Un bon vin chaud remettait d'un petit rhume (on croyait d'ailleurs beaucoup aux vertus du vin). Monette se souvient que sa maman lui appliquait un peu de vaseline sur le nez quand elle était enrhumée, la protégeant ainsi d'irritations ou de rougeurs. Contre la constipation, on utilisait des poires en caoutchouc pour lavements, ou l'on administrait des petites quilles de savon glycériné aux enfants. Pour les problèmes circulatoires, le sirop de jouvence de l'abbé Soury (inventé en 1745 et toujours commercialisé) et contre les coliques, l'élixir parégorique. Chez l'herboriste, on trouvait différentes tisanes : la bourrache contre la toux, le sureau pour les poumons, les queues de cerise diurétiques, la camomille pour le foie, le tilleul et la verveine pour la digestion...

       Contre les rhumatismes, on portait une ceinture ou un gilet de flanelle qui permettait de garder la chaleur de la transpiration sur le dos. En ce qui concerne les lunettes, on les achetait à la foire. Les plus fortunés allaient chez l'oculiste de Montélimar, M. Flandin, rue Roserie (rue Roger Poyol). Pour les soins dentaires, chacun se souvient du Docteur Truche à Montélimar, un vrai bourreau... Ceux qui ne pouvaient pas y aller avaient des chicots à la place des dents. Pour une luxation ou une foulure, on allait chez le rebouteux, le curé d'Aubignas ou le père Magnet, charpentier à Dieulefit, qui soignait aussi les bêtes contre ces mêmes maux... Si on questionnait les gens, personne n'allait voir les guérisseurs... Pourtant, c'est Yvonne Boisson qui éteignait les brûlures et M. Roustand (ferme Francis Gay) qui enlevait les verrues avec une ficelle et des incantations. M. Béroule de Rochefort détenait différentes recettes, contre le ronflement par exemple, et même contre la coqueluche : dans un panier à salade, il fallait saupoudrer du sucre sur des escargots fraîchement ramassés, et recueillir la bave pour la faire boire (!!!). Mais Jeanne n'a jamais voulu essayer !!!

       Merci encore à vous « les anciens » de Puygiron, qui me surprenez à chacun de nos rendez-vous par votre joie de vivre et votre jeunesse. Merci aussi pour votre gentillesse et générosité. Je compte sur vous pour le numéro 13 !

                                                                                        D. R.

       Publié dans Le Giron n° 12 (juillet 2007)

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Le Giron, bulletin semestriel

Un bulletin pour quoi faire ? Pour se rassembler le temps d’une lecture, se dire qu’on fait partie d’un village et qu’on a des intérêts, des souvenirs, des projets communs. Pour donner envie aux gens de réfléchir à ce qui se passe autour d’eux, à parler à leur tour car seul le dialogue fait avancer le monde.

Le village perché de Puygiron

                                                               Aquarelle de Morice Viel

Belvédère de la Drôme provençale, situé sur un mamelon dominant le Jabron et la plaine de la Valdaine, offrant un très beau point de vue. Au hasard des ruelles, on admirera portes et fenêtres encadrées de pierres sculptées. Le premier village médiéval était situé à Saint-Bonnet, près du prieuré carolingien, sur le site d’une villa gallo-romaine. Ce premier village fut abandonné au XIIIe siècle et les habitants se réfugièrent sur « le puy » sous la protection du château.

Le château : construit fin XIIe / début XIIIe siècle, construction rectangulaire flanquée de quatre tours, l’une d’elles formant donjon. À proximité, la salle des gardes, avec une énorme cheminée et des voûtes retombant sur un énorme pilier central. Une cour intérieure avec une tour Renaissance hexagonale possédant une porte ogivale et escalier à vis. Le château a été classé monument historique en 1957.

L’église, de style roman, construite en 1867. La chapelle romane Saint-Bonnet : datée du XIIe siècle, église paroissiale jusqu’en 1770, elle présente une abside en demi-cercle voûtée en cul-de-four, un chœur surélevé, une nef unique de trois travées, un escalier à vis qui conduisait à un clocher aujourd’hui disparu. La pierre de Puygiron a été exploitée jusqu’en 1914.

Puygiron a eu son chantre, le félibre Morice Viel (1881 - 1929).

D'après Jeannine Laurent (Etudes drômoises, n° 3, année 2000, p. 41)

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