Puygiron Art Festival 2012 - Cour du Château
Nous savons qui nous sommes, nous savons ce que nous voulons. Cela paraît si simple d’énoncer à voix haute ou d’écrire ces quelques mots. Pour qu’ils correspondent à un véritable état de conscience lucide que de chemin parcouru pour les hommes et les femmes qui peuvent prétendre à un regard juste sur eux-mêmes et le monde. C’est le fruit d’une quête, d’une vie, un apprentissage. Pourquoi sous beaucoup de gouvernements autoritaires la sociologie n’était pas enseignée, ni la philosophie et la psychanalyse demeurait interdite ? On le sait bien. Afin que le jeune individu ne prenne pas conscience des manipulations, de la langue de bois, de la tutelle dans laquelle on l’installe. Chez nous et ailleurs, dans les pays des libertés, trop souvent triomphe l’incapacité à se déterminer, à saisir la voie qui est la bonne, au milieu de la cacophonie des discours médiatiques touchant tous les domaines de la société, du politique aux loisirs.
On fête aujourd’hui le dixième anniversaire de notre modeste bulletin Le Giron et il semble opportun de rappeler que l’une des motivations du petit groupe des fondateurs était bien de stimuler la prise de conscience de la réalité de ce que l’on vit, de ce qui est aussi proposé aux citoyens dans son environnement immédiat et lointain, comme de l’amener à dire ce qu’il en pense. Dire c’est déjà agir. Le verbe est maître, il crée du réel, il le modifie.
Souvenez-vous de la réplique de Phèdre (Racine) à sa nourrice Œnone prononçant le nom d’Hippolyte après la confession que la jeune reine faisait de son amour pour son beau-fils mais sans jamais le nommer. C’est toi qui l’as nommé ! Eh oui quand le mot est là, il concrétise, fait vivre la chose.
L’une des actions émergentes de ces dix années est sans doute la création de la bibliothèque de Puygiron à l’initiative de Danielle Jean, que nous regrettons tant, et Ghislaine Teyssier. Cette information n’est pas sans lien avec ce qui précède car nos deux amies pensaient avec nous que la construction de soi, l’avènement d’une pensée lucide et libre, n’étaient pas sans relation avec la pratique de la lecture, la fréquentation des bons auteurs, romanciers, poètes, historiens, philosophes. Les enfants étant les destinataires privilégiés de cette initiative.
Nous savons que nous avons avec nous beaucoup de lecteurs heureux de voir formulées des analyses sans prétention sur des sujets touchant à leur vie, même à leur quotidien. Ils aiment aussi retrouver la mémoire d’un passé récent à travers les interviews de personnes d’un certain âge. Nous souhaiterions d’ailleurs qu’ils nous écrivent et nous proposent aussi des sujets qui les intéressent, qu’ils peuvent traiter ou nous demander de le faire. Retrouver l’esprit des communautés villageoises d’autrefois tel que nous le fait entrevoir Madame Brunet interviewée dans ce numéro, certes, paraît difficile, mais inventer dans des conditions de vie complètement différentes, une forme de solidarité à travers une meilleure communication entre les personnes, n’est pas insurmontable si chacun en éprouve le désir et la nécessité. C’est le souhait des fondateurs du Giron en cet anniversaire.
Nicole de Pontcharra