Le Giron demande aux Puygironnais expatriés qui le souhaitent de se rappeler à leurs concitoyens en envoyant une lettre, une note, évoquant leur nouvelle situation.
A la veille de la nouvelle année nous avions reçu ce courrier de Patrice de Poncharra envoyé en mission au Libéria par le Haut Commissariat aux Réfugiés des Nations unies. Il a quitté aujourd’hui le Libéria pour le Kosovo.
J’ai eu chaque fois plaisir entre deux missions à rester en contact avec mon village et avec mes voisins et concitoyens de Puygiron, et le vecteur de communication que représente le Giron est une initiative intelligente et heureuse qui me permet aujourd’hui, de dire aux Puygironnaises et Puygironnais mon attachement pour notre colline et pour eux, pour celles et ceux qui m’ont vu grandir et qui font partie de ma vie.
Qui suis-je ? Un Poncharra du village, fier de ses racines dauphinoises, pour qui le sens de la famille a une importance vitale, et je mesure la richesse de l’héritage moral dont je suis bénéficiaire, élevé par d’admirables parents, choyé par d’extraordinaires grands-parents… père de trois beaux et bons enfants, et à mon tour grand-père d’une ravissante petite fille.
Non pour répondre à une tradition mais par conviction et avec enthousiasme j’ai embrassé la carrière des armes comme mon très cher et honorable Colonel de père, et j’ai eu la chance de vivre un métier que j’ai aimé au service de mon pays. Trente deux très belles années faites d’exigence et de sacrifice, de disponibilité, de générosité, d’enthousiasme dans l’arme de la cavalerie légère blindée et la Légion Étrangère… Que de souvenirs forts et de moments intenses, partageant les difficultés comme les joies, « grandeurs et servitudes militaires » « Honneur et Fidélité ».
Voyant s’approcher l’âge de la retraite, j’ai légèrement anticipé ce moment et j’ai quitté ma famille militaire, non sans quelque nostalgie pour aller reprendre les bancs de l’école et passer un D.E.S.S. de droit humanitaire international et un diplôme de juriste de terrain à l’Université d’Aix en Provence, un vrai bain de jeunesse au milieu d’étudiants tous aussi généreux et prometteurs.
Mon objectif était de continuer une vie active, faite d’aventures et d’action, opérationnelle, au service d’une grande cause, « l’humanitaire » au sein des organisations non gouvernementales ou internationales pour lesquelles l’homme est au cœur des enjeux.
Aujourd’hui dans le cadre du mandat du Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés, UNHCR, d’autres « campagnes », d’autres missions me font sillonner le monde, connaître d’autres cultures... Sri Lanka, Irak, Jordanie, Tchad et Darfour, Burundi, Congo, Rwanda, Tanzanie, Kenya, et aujourd’hui le Liberia
Mais mon rôle est d’intervenir dans les pays en crise ou en post crise, où je ne vois bien souvent que le malheur, la désolation et le désespoir, ou les guerres ont tout ravage, « paradoxe » : la folie des hommes a eu raison de leur différends et ne leur a fait gagner que douleur, tristesse et destruction.
Une devise de famille : « Entoure et Protège », une formation de soldat qui m’a appris que la mission est sacrée et qu’il faut la mener jusqu’au bout, ça aide dans les moments difficiles. On ne baissera pas les bras mais parfois on peut être las de voir tant de détresse autour de soi et tant de manque de réactivité de la communauté internationale, alors qu’on tente autant que faire se peut et a chacun son niveau d’apporter une réponse d’urgence aux populations dans le besoin.
Alors, vive le Giron ! On ne dira jamais assez l’indispensable nécessité de se connaître, de se parler, d’échanger, partager, s’accepter, se comprendre pour vivre ensemble et vivre heureux.
Communiquer et entretenir les liens, faciliter les contacts, rêver d’harmonie… C’est possible à Puygiron, alors pourquoi pas ailleurs dans le monde, dans de merveilleux endroits comme le Sri Lanka ou le Timor, sur les rivages de ces pays superbes des grands lacs de l’Afrique de l’Est, ou sur les côtes de l’Afrique de l’Ouest, dans les fantastiques déserts de l’Afrique centrale et du Nord, dans les immensités de l’Asie centrale, au milieu de mille collines ou au fond d’une extraordinaire forêt primaire.
A la veille de Noël que nous espérons tous être un temps de paix et de réconciliation, de partage en famille, je sais que vous aurez une pensée pour toutes ces populations qui aspirent à rentrer chez elles, à retrouver leurs villages, à reconstruire ensemble, et je tiens à vous assurer toutes et tous dans mon village de mon affectueux et fidèle souvenir. Je vous souhaite une joyeuse et sainte fête et formule pour chacune et chacun des vœux de bonne et belle année 2005.
Patrice de Poncharra
Publié dans Le Giron n° 8 (janvier 2006)